Un procureur portugais vient de refuser d’engager des poursuites contre plusieurs centaines d’abonnés à Internet suspectés de téléchargement illégal. Il a ainsi retenu que le propriétaire d'une adresse IP n'était pas forcément l'utilisateur de l'ordinateur à l'origine de l'infraction, et que le partage de fichiers en P2P était en outre légal s'il était effectué pour un usage personnel.En janvier 2011, une association d’ayants droit d’œuvres audiovisuelles, l’ACAPOR, déposait des plaintes concernant plusieurs centaines d’adresses IP suspectées de téléchargement illégal. À l’époque, la démarche de l’organisation était claire : saturer les tribunaux pour se faire entendre des autorités.
« Nous faisons tout notre possible pour alerter le gouvernement de la situation très grave de l'industrie du divertissement », commentait l’ACAPOR selon
TorrentFreak. L’association évoquait alors le chiffre de
« 1000 plaintes par mois » pour embarrasser suffisamment le système judiciaire portugais.
Le téléchargement en P2P est légal, à condition qu'il soit limité à un usage personnelLe procureur saisi de ces plaintes vient toutefois d’infliger un sérieux revers à l’ACAPOR. En effet, le ministère public a refusé selon
Exame Informatica d’engager des poursuites contre les propriétaires de ces adresses IP, et ce après que les services de police aient étudié ces plaintes.
« D’un point de vue juridique, en considérant que les gens qui partagent des fichiers sont à la fois des uploaders et des downloaders, nous considérons que l’utilisation des réseaux P2P pour un usage personnel est légal, même si les utilisateurs continuent de partager le fichier une fois son téléchargement terminé ».
Le ministère public a précisé que le droit d’auteur devait être protégé, mais tout en prenant en considération
« le droit à l'éducation, à la culture et la liberté dans l'espace numérique, en particulier lorsque de telles libertés individuelles n’ont rien à voir avec des questions commerciales ». Autrement dit, il est possible de partager une œuvre protégée sur les réseaux P2P, à condition d'en faire un usage personnel et non-marchand.
L’IP insuffisante pour débusquer le pirateToujours selon Exame Informatica, cité par
TorrentFreak, il également est apparu au cours des enquêtes que les adresses IP des abonnés incriminés n’étaient pas suffisantes pour établir leur culpabilité. La décision du procureur retient ainsi que le propriétaire d'une adresse IP
« n’est pas nécessairement l’utilisateur présent au moment de l’infraction, ni celui qui met à disposition l’œuvre protégée, mais l’individu qui enregistre le service à son nom, indépendamment de son utilisation ». De la même manière que la
justice américaine il y a quelques mois, le ministère public a donc considéré qu'il n'était pas possible de déterminer avec certitude l'auteur du téléchargement.
Rappelons au passage qu’en France, la contravention de
négligence caractérisée de sécurisation de l’accès à Internet permet à la Hadopi de contourner ces problèmes d’identification. Le propriétaire d’une adresse IP est responsable de ce qui se passe sur sa ligne, peu importe qui télécharge. La
première condamnation prononcée sur la base de ce texte l'a d'ailleurs parfaitement illustré, puisque ce n'était pas l'abonné qui avait téléchargé illégalement, mais sa femme.
Une décision qui donne finalement un nouvel argument pour muscler la législation Dans un
communiqué, l’ACAPOR a déploré cette interprétation de la loi :
« Une question se pose maintenant : qui va vouloir louer un DVD, alors que vous pouvez maintenant le télécharger sur Internet et le regarder sans payer quoi que ce soit à personne, et ce en toute légalité ? ». Seul point positif selon eux : cette décision permet de remettre sur le tapis une nécessaire réforme de la législation sur le droit d’auteur, qui leur a été promise pour la fin de l’année par la Secrétaire d’État à la Culture.
Source : pcinpact.com