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La Fédération Internationale de l'Industrie Phonographique passe du chasseur au chassé. L'avocat suisse Sébastien Fanti a décidé d'attaquer l'IFPI qui a reconnu exercer elle-même une traque aux internautes, dans un procédé similaire à celui employé par la société Logistep dans la désormais célèbre affaire Techland.
L'IFPI procède-t-elle illégalement à des relevés d'adresses IP pour intimider des internautes suspectés d'avoir téléchargé illégalement des morceaux de musique, dans le but d'obtenir de leur part un paiement contre la promesse d'éviter un procès coûteux ? C'est en regardant l'émission de la télévision publique suisse "Mise au point" que l'avocat Sébastien Fanti (par ailleurs avocat de l'association Razorback) a eu confirmation, de l'aveu même de l'IFPI, qu'elle procédait de la même manière que Logistep, déjà attaquée en Suisse.
L'IFPI reçoit des listes d'adresses IP puis se fait justice elle-même, et elle assure ne pas pouvoir faire autrement, explique le reportage de la TSR qui est allée interroger la Fédération. "Dans les cas de violation de droit d'auteur il s'agit toujours d'un délit envers la propriété privée", expliquait Beat Högger, représentant de l'organisation des majors du disque. "Ce ne sont donc pas des délits officiels, ils mettent en péril des intérêts privés et non des intérêts publics. Alors les procureurs et la police ne s'activent que sur plainte, ils n'agissent pas spontanément", ajoutait-il pour justifier de s'en remettre à sa propre justice privée.
Maître Fanti bondit. "L'IFPI a avoué se faire justice elle-même, ce que je ne peux tolérer. Je rappelle d'ailleurs aux internautes qui recevraient un courrier de cette firme de ne pas payer l'amende", assure l'avocat au journal valaisan Le Nouvelliste. Sébastien Fanti, en son nom propre, a adressé un courrier en recommandé au siège de l'IFPI, à Zurich, pour leur tendre un piège en attendant, très probablement de saisir la justice. "Je leur laisse trente jours pour me fournir toutes les données me concernant qui seraient contenues dans leurs fichiers et m'apporter la preuve de la déclaration de leur base de données au préposé fédéral à la protection des données", explique-t-il.
Il a pour cela le soutien du Préposé à la protection des données, la CNIL suisse. "L'Individu a des droits en matière de données", rappelle Daniel Menna, le porte-parole du Préposé. "Et ce que font ces sociétés de surveillance est illégal. Il n'y a aucun motif justificatif pour cette atteinte à des données personnelles". La justice a été saisie dans le cas de Logistep, qui a refusé de mettre fin à ses activités. Le Tribunal administratif fédéral devra trancher, et "s'il suit notre argumentation, cela fera jurisprudence et toutes ces sociétés devront cesser de traquer illégalement les internautes", assure D. Menna.
Si l'IFPI ne parvient pas à fournir à Maître Fanti la preuve que son relevé d'adresses IP est légal, le chemin sera ouvert pour une procédure pénale à l'encontre du représentant de l'industrie du disque, qui devra cesser ses manoeuvres d'intimidation, et probablement dédommager à son tour les plaignants. Ce serait, après la condamnation de l'avocate Elizabeth Martin, une démonstration de plus qu'il n'est pas possible de procéder n'importe comment sous prétexte que l'on cherche à lutter contre le téléchargement illégal.
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